L’Europe invente la “prescription culturelle” : vers une nouvelle ère de santé publique préventive
- oliviertoma
- 15 oct.
- 3 min de lecture
Et si l’on soignait autrement ?
Si l’on prescrivait moins de médicaments, et davantage de culture, de lien social et d’émotions partagées ?
C’est précisément la voie que trace aujourd’hui l’Union européenne avec la publication du rapport « Culture and Health – Time to Act », dévoilé le 10 octobre 2025.Un texte majeur, coordonné par le programme Interreg Baltic Sea Region, qui valorise un modèle encore méconnu du grand public : les “Arts on Prescription”, ou l’art sur ordonnance.
Quand la santé s’invite dans les ateliers
Dans plusieurs pays de la mer Baltique — Suède, Finlande, Danemark, Allemagne du Nord — des médecins prescrivent désormais des activités artistiques structurées à leurs patients souffrant d’anxiété, de dépression, de fatigue ou de solitude.
Concrètement, le praticien oriente la personne vers un atelier artistique collectif (chant, théâtre, danse, peinture, écriture) encadré par des artistes formés à la médiation.L’objectif : stimuler la confiance, la créativité et les interactions sociales, plutôt que de s’enfermer dans une logique exclusivement pharmacologique.
Et les résultats sont là :
Amélioration du bien-être mental et du sommeil,
Réduction du stress et de la consommation de psychotropes,
Diminution de l’isolement social,
Hausse du sentiment d’utilité et d’appartenance.
Ces impacts positifs, déjà observés dans plus de 300 programmes pilotes, font de ce modèle un outil concret de santé publique préventive.
De la Baltique à Bruxelles : l’art entre dans la stratégie santé de l’Europe
L’Union européenne ne s’y trompe pas : elle appelle désormais les États membres à intégrer la culture dans leurs politiques de santé et à financer des dispositifs pérennes de prescription sociale et culturelle.Trois leviers d’action sont proposés dans le rapport :
Institutionnaliser les prescriptions culturelles dans les systèmes de santé nationaux,
Former les professionnels de santé à la coopération avec les acteurs culturels,
Évaluer scientifiquement les bénéfices sur la santé mentale, la cohésion sociale et l’économie de la santé.
Pour la Commission, il s’agit d’un enjeu global : transformer la prévention en un investissement social rentable.Les données issues de l’OMS Europe sont d’ailleurs explicites :
Chaque euro investi dans la culture génère jusqu’à trois euros d’économies en coûts de santé évités sur le long terme.
Autrement dit : l’art et la culture ne sont plus un “plus” mais un actif stratégique de santé durable.
Vers une médecine du lien et du sens
Cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus large, déjà amorcé en France avec la politique Culture et Santé des ARS et DRAC, ou encore la prescription sociale expérimentée en Allemagne, au Royaume-Uni et en Suisse.
Partout, les mêmes constats :
La santé mentale devient un défi collectif,
Le lien social agit comme un médicament,
Les solutions passent autant par la culture que par la chimie.
C’est là qu’intervient la notion de santé globale (One Health / Planetary Health) : replacer l’humain au centre, relier santé physique, psychique, sociale et environnementale, et favoriser les comportements durables.
L’art, dans cette perspective, devient un outil d’équilibre collectif — une ressource de sens et d’énergie, au service du bien commun.
💡 Une opportunité RSE majeure
Pour les établissements de santé, les collectivités et les entreprises engagées dans la RSE, cette approche ouvre un champ immense :
Développer des partenariats culture-santé locaux,
Soutenir la santé mentale des équipes par des projets artistiques collectifs,
Créer des espaces de respiration et de créativité au travail,
Favoriser la prévention active par le plaisir, la beauté, et le lien humain.
C’est aussi une occasion de réinventer la prévention : sortir du discours anxiogène pour replacer la santé dans une dynamique de joie, d’inspiration et d’intelligence collective.
🕊️ Conclusion : l’Europe du soin passe par l’émotion
Avec “Culture and Health – Time to Act”, l’Union européenne envoie un message clair :
la santé de demain ne se construira pas uniquement dans les laboratoires, mais aussi dans les ateliers, les musées et les théâtres.
L’art sur ordonnance n’est plus une utopie nordique : c’est une nouvelle manière de soigner nos sociétés — par la beauté, l’émotion et la rencontre.Et si la vraie prévention commençait… par une dose quotidienne de culture ?

📚 Sources :
Rapport Interreg Baltic Sea Region – Culture and Health: Time to Act (2025)
OMS Europe, Arts and Health Evidence Base (2024)
Commission européenne – Culture for Health Platform (2025)



Un jour l'OMS rappellera peut-être ses propos de Van Gogh écrit à son frère Théo je me sens imbécile de te drvoir demander l'autorisation de peindre à un médecin. Un jour peut-être l'OMS proposera de faire des études sur les effets délétères des privations de culture